Évaluation de la Culture du Chanvre dans la Région de l'Estrie

Rapport Final 1998

par  P. Girouard, B. Mehdi et R. Samson

Resource Efficient Agricultural Production (REAP) – Canada

C.P. 125, Ste-Anne-de-Bellevue, Quebec, H9X 3V9

Tél.: (514) 398-7743; Fax: (514) 398-7972

Courriel: reap@interlink.net

 

(Étude complétée pour ChanvrEstrie inc. 125 rue Morgan, Coaticook, Qc, J1A 2S5 )

Février 1999

 

 

Table des Matières

 

1. Introduction
2. Revue de Littérature 
2.1 Le Chanvre Industriel
2.2 Production de Fibre
2.3 Production de Grain
2.4 Les Pratiques Culturales
2.5 Conclusion
3. Méthodologie
4. Résultats
4.1 Terminologie
4.2 Données Météorologiques
4.3 Préparation du Sol et Semis
4.4 Fertilisation
4.5 Mauvaises Herbes et Insectes
4.6 Étude 1: Effet de la Date d'Ensemencement sur le Rendement
4.7 Étude 2: Densité de Semis et Rendement
4.8 Étude 3: date de Récolte et Rendement
4.9 Coûts de Production
4.10 Évaluation du Rendement en Filasse et Chènevotte
5. Conclusion
6. Bibliographie

Annexe 1: Plan des Parcelles, Site de Compton 37

 

1. INTRODUCTION

L'entrée en vigueur du Réglement sur le Chanvre Industriel, en mars 1998, permet maintenant la production de cette culture pour des fins commerciales au Canada. Le retour du chanvre industriel au pays s'est cependant véritablement effectué en 1994 avec l'obtention d'un permis de recherche pour une superficie de quatre hectares par la compagnie Hempline du sud de l'Ontario. Depuis, les superficies pour fins de recherche, et maintenant commerciales, ne cessent d'augmenter dans les diverses régions du pays. En 1998, le groupe ChanvrEstrie au Québec confia au groupe de recherche REAP-Canada le mandat d'évaluer trois cultivars de chanvre industriel sur deux fermes de la région de l'Estrie. La suite de ce rapport présente une revue de littérature ainsi que la méthodologie suivie et les résultats obtenus lors des essais.

2. REVUE DE LITTÉRATURE

La revue de littérature qui suit donne un aperçu des pratiques culturales nécessaire à la bonne marche de la production de chanvre industriel, ainsi que des variétés recommandées pour la production de fibre/textile et de graines, le tout étant présenté sous l'angle des conditions agricoles du Québec.

2.1 Le chanvre industriel

Quarantes-sept variétés de chanvre industriel (Cannabis sativa) sont actuellement enregistrées ou disponibles à l’échelle commerciale dans la Communauté Européenne (Tableau 2.1). Tous, sans exception, sont d’origine européenne et furent dévelopées à l’intérieur ou pour les régions au nord du 45ième parallèle. Les variétés européennes se distinguent notament par leur période de floraison, qui débute vers la mi-saison estivale, au moment où la longueur des journées décroît. Les variétés enregistrées par la Communauté Européenne sont reconnues ici conditionnellement à l'approbation de Santé Canada. Le chanvre industriel compte aussi des variétés originant d'Asie semi-tropicale, mais celles-ci n’ont fait l’objet de peu ou pas de sélection génétique et ne sont pas disponibles pour des fins commerciales tant en Europe qu'au Canada.

Les variétés d’origine européenne furent développées sur une période de plusieurs centaines d’années par les paysans des principales régions productrices de chanvre. Ces variétés reposent sur trois souches: les écotypes originant du Nord et du Centre de l’Europe, les écotypes originant du Sud de l’Europe, et ceux originant de l’Asie de l’Est. Ceci représente un bassin génétique relativement limité pour une culture, selon Watson et Clarke (1997), et expliquerait pourquoi les variétés européennes actuelles sont souvent peu adaptées aux régions hors de l’Europe. Watson et Clarke (1997) réfèrent vraisemblablement ici à des conditions climatiques et des latitudes différentes à celles existant en Europe.

 

 

Tableau 2.1 : Variétés de Chanvre Industriel Enregistrées (47)

France

Pologne

Yuso (Zolo) 16

Espagne

Fedora 19

Bialobreskie

Yuso (Zolo) 31

Delta 405

Felina 34

Beniko

Glukhov 33

Delta-Llosa

Fedrina 74

Dolnoslaskie

Zenica

Tchécoslovaquie

Futura 77

Roumanie

Dneprovskaya

Odnodomnaya 6

Rastslavisqua

Fibrimon 21

Fibramulta 151

Yougoslavie

Fibrimon 24

Lovrin 110

Kuban

Novosadska Konoplja

Fibrimon 56

Sequini

Italie

Allemagne

Férimon 12

Irene

Carmagnola

Fasamo

Epsilon 68

Bulgarie

Carmagnola

Selezionata (CS)

 

Santhica 23

Mecnaja copt.

 

Hongrie

Silistrensi

Fibranova

 

Kompolti

Ukraine

Eletta Campana

 

Kompolti Sargasazru

Yuso (Zolo) 11

Suprafibra

 

Uniko-B

Yuso (Zolo) 13

Slovénie

 

Kompolti Hibrid TC

Yuso (Zolo) 14

Rudnik

 

Fibriko

Yuso (Zolo) 15

Pesnica

 

Adapté de Watson et Clarke (1997)

 

 

Le chanvre industriel actuel est composé de deux principaux types : monoïque and dioïque. Les variétés dioïques sont décrites par Mathieu (1980) comme suit :

…Les plantes mâles ont une tige grêle qui perd ses feuilles après la floraison, puis meurt, ce qui accentue considérablement le dimorphisme sexuel que les inflorescenceses des deux sexes donnent à cette espèce. L’inflorescence mâle en grappe plus ou moin lâche et presque totalement dépourvue de feuilles s’oppose à l’inflorescence femelle composée d’épis à l’aisselle de feuilles nombreuses. Dans les deux cas, la tige herbacée, simple, dressée et nouée tous les 10 à 30 cm porte des feuilles opposées (alternées au sommet vers l’inflorescence), longuement pétiolées, profondément palmatissequées en 5 à 9 folioles lancéolées inégales. … (Mathieu (1980), p. 4).

Les variétés monoïques sont constituées de plants à port femelle, à l’inflorescence de type femelle où se développent en sus des fleurs mâles à l’aisselle des segments distaux (Mathieu, 1980). Les avantages de ces variétés sont importants selon Mathieu (1980): productivité en tiges et en graine accrue et maturité homogène de tous les plants. Les variétés de chanvre spontanées et les populations anciennement cultivées en France étaient toutes de type dioïque. Les variétés actuellement enregistrées à l’échelle européenne sont composées de variétés dioïques et monoïques, quoique que les varitétés originant de la France soient tous monoïques.

La culture chanvrière résulte en la production de trois principaux types de matière première, lesquelles ont des applications commerciales distinctes. La filasse est la composante de la tige trouvée dans l'écorce et représente généralement de 30 à 35% de la masse totale de la tige. La filasse est la fibre longue, de haute qualité, qui fait la réputation du chanvre industriel dans les marchés des pâtes et papiers, du textile, des cordages, et ainsi de suite. La chènevotte représente le coeur de la tige et se trouve sous l'écorce. La chènevotte représente de 65 à 70% de la masse totale de la tige et est composée de fibre courte ne se qualifiant pas sur les marchés de la filasse. Les litières animales, les panneaux de particules et l'isolation sont les principaux marchés actuellement en développement pour cette composante. La graine de chanvre, communément appelée chènevis, représente le troisième produit pouvant être tiré de cette culture.

2.2  Production de Fibre

Variété

La grande majorité des variétés de chanvre industriel actuellement disponibles ont été développées pour la production de fibre (pâtes et papiers, cordage, etc.). La production de grain s’est avérée peu rentable dans le passé en l’absence de marchés à haute valeur ajoutée et/ou spécialisés, contrairement à ce qui semble se dessiner de nos jours. La production chanvrière spécifiquement pour des fins textiles s'est aussi avérée marginale au cours des dernières décennies. Les pays faisant partie de l'ancien Bloc de l'Est, dont la Roumanie, semblent être l'exception à la règle. La revue de littérature qui suit se concentre principalement sur les variétés figurant sur la liste de variétés approuvées pour la production au Canada en 1998. L'information y est présentée de façon sommaire et reflète en partie la disponibilité limitée d'informations techniques et agronomiques pour la majorité des variétés discutées. Une enquête menée directement auprès des propriétaires des ces variétés sera nécessaire à l'avenir.

Variétés Françaises

Les variétés développées par la France sont présentées au Tableau 2.2. Toutes sont monoïques et, lorsqu’elles sont disponibles pour la vente, l’acheteur peut choisir entre deux qualités de semences. La semence de première qualité (élite) consiste presque entièrement en des plants monoïques. La semence de deuxième qualité peut contenir par contre 15-30% de plants mâles et une proportion appréciable de plants femelles (de Meijer, 1995). Les variétés françaises sont cultivées prinicipalement pour la production de fibre (pâtes et papiers). Le nom des variétés françaises est habituellement suivit d’un nombre, ayant pour but d’indiquer la maturité relative des variétés : un nombre élevé fait référence à une floraison et une récolte tardive, et vice-versa. La programme d’amélioration français aurait par ailleurs récemment enregistré deux variétés contenant des quantités minimes ou nulles de THC, soit les variétés « Epsilon 68 » et « Santhica 23 » (de Meijer, 1995).

Variétés Hongroises

Les variétés hongroises sont habituellement dioïques et utilisées, dans leur pays d'origine, pour la production de cordage et de tissus pour usages industriels. La variété « Kompolti » fut développée pour un rendement accru en fibre (filasse) alors que la variété « Kompolti Sargaszaru » se distingue par sa tige de couleur jaunâtre (de Meijer, 1995). La variété « Uniko-B » fut développée pour la production de fibre selon de Meijer (1995) alors qu'elle serait la seule variété de chanvre industriel spécifiquement développée pour une production accrue en grain selon Watson et Clark (1997). La variété « Fibriko » est la plus récente des variétés hongroises (de Meijer, 1995).

Variétés Ukrainiennes

Trois variétés en provenance d’Ukraine étaient éligibles pour la production au Canada en 1998, soit le Zolotonosha 11 (USO-11 ou YUSO-11), le Zolotonosha 13 (USO-13 ou YUSO-13) et le Zolotonosha 15 (USO-15 ou YUSO-15). Les trois variétés sont de type monoïque et, comme la majorité des variétés cultivées en Ukraine et en Russie, elles sont utilisées dans la production de cordages, de cable d’acier et de tissus pour usages industriels. Un nouveau cultivar, le YUSO-15, contiendrait peu ou pas de THC (Watson et Clarke, 1997). Le nombre suivant des cultivars ayant des noms indentiques ne signifie pas nécessairement la présence d’ancêtres communs (de Meijer, 1995).

Variétés Roumaines

La production roumaine de chanvre industriel est destinée à la fabrication de tissus et de fil de qualité supérieur (de Meijer, 1995). Peu d’information existe sur les variétés roumaines éligibles pour la production au Canada en 1998, soient les variétés Lovrin 110, Secuienie 1, et Irene.

Variétés Italiennes

Les variétés italiennes « CS », « Carmagnola » et « Fibranova » faisaient partie de la liste cultivars éligible au Canada en 1998. Peu d’information existe sur ces variétés à part le fait qu’elles soient tous du type monoïque.

Variétés Allemandes

La variété allemande « Fasamo » est une variété récente, monoïque, et développée pour la production de fibre et de graine. Plus d’information n’est pas disponible.

Rendement

Les rendements qui suivent ont été obtenus avec des taux de semis reconnus pour la production de fibre (densité élevée pouvant ateindre 500 graines/m2), sauf indication contraire. Les rendements présentés ont tous été obtenus au Canada.

Manitoba

Jack Moes, chercheur au ministère de l'agriculture manitobain, gère des expériences sur le chanvre industriel depuis 1995. Les résultats obtenus en 1996 sur deux sites sont présentés au Tableau 2.2.

Les variétés à floraison plus tardive (les 4 dernières du Tableau 2.2) furent les plus productives aux deux sites avec l’obtention de rendement en tiges allant jusqu’à 11.2 tonnes/ha. Sans égard à la qualité de la fibre produite par les différents cultivars, ces variétés sont recommandées par Moes (1997) afin de maximiser le rendement en fibre.

       

      Tableau 2.2: Rendements en Tige Obtenus avec le Chanvre Industriel au Manitoba en 1996 

      Parcelles de Recherche

       

      Sud-ouest du Manitoba (Wawanesa)

      Manitoba Central (Morden)

       

      Population

      Rendement en tige

      Population

      Rendement en tige

       

      (Plants/m2)

      kg/ha

      (Plants/m2)

      kg/ha

      Zolotonosha 11

      158

      7,860 bc

      245 c

      5,160 b

      Zolotonosha 13

      145

      7,920 bc

      230 cd

      4,540 b

      Polish 1

      142

      8,150 bc

      210 cd

      5,200 b

      Polish 2

      114

      7,260 c

      179 cd

      4,400 b

      Fedora 19

      164

      8,440 b

      415 a

      4,890 b

      Felina 34

      185

      10,710 a

      370 ab

      7,290 a

      Uniko-B

      119

      10,520 a

      ---

      ---

      Kompolti

      139

      10,450 a

      331 b

      7,200 a

      Futura 77

      172

      11,160 a

      263 c

      7,330 a

      Moyenne

      149

      9,170

      280

      5,750

      CV (%)

      21.5

      7.2

      16.4

      13.4

      Adapté de Moes (1997).

      Un taux de semis de 500 graines/m2 fut utilisé.

      Les moyennes ayant des lettres différentes à l’intérieur d’une même colonne ont une différence significative à p<0.05 selon le test LSD

 

 

Ontario

La région du sud de l’Ontario est présentement une des plus avancées au Canada au niveau de la commercialisation du chanvre industriel, en majeure partie en raison du leadership et des investissements importants encourrus par les compagnies Hempline et Kenex. Peu d'informations techniques détaillées sont cependant disponibles de ces compagnies privées. En termes de rendement, les producteurs de chanvre associés à Kenex seraient payés sur une base de 7.5 tonnes de fibre par hectare.

Dans les régions du nord et du nord-est de l'Ontario, Gordon Scheifele, de la station de recherche de l’OMAFRA de Thunder Bay, gère un programme d'évaluation du chanvre industriel. Cinq variétés furent évaluées pour la production de fibre et/ou de graines sur différents sites de recherche du nord-ouest de l’Ontario en 1997. Le rendement en fibre fut évalué pour chaque variété, bien que certaines étaient destinées uniquement à la production de graines. Le rendement moyen obtenu en parcelles de recherche en 1997 fut de 5.9 tonnes/ha (Tableau 2.3).

       

       

      Tableau 2.3 : Rendement en Tige du Chanvre Industriel

      Nord et Nord-ouest de l’Ontario – 1997

      Parcelles de Recherche

      Variété

      Objectif

      Rendement en tige

      (après rouissage)

      (tonne/ha)

      Félina

      Graine et fibre

      6.4

      Fédrina

      Graine et fibre

      5.2

      Uniko-B

      Fibre

      6.5

      Zolotonosha 13

      Graine

      5.1

      Kompolti

      Fibre

      6.4

      Moyenne

       

      5.9

Source: Scheifele (1999).

 

 

Les résultats pour l’année 1998 sont encore fragmentaires mais, pour ce qui est des rendements obtenus en parcelles commerciales, une nouveauté comparativement à l’année précédente, 7 variétés furent évaluées pour la production de fibre (Fédora 19, Félina 34, Fédrina 74, Secuieni 1, Irene, Uniko-B, et Kompolti). Le rendement maximum en tige obtenu après rouissage serait de 9.9 t/ha. Par contre, la majorité des cultivars étaient dans une fourchette variant entre 3.7-5.2 t/ha (Scheifele, 1999). Aucun résultat n’était disponible en ce qui concerne les parcelles de recherche.

2.3 Production de Grain

Variétés

Tel que mentionné précédemment, la grande majorité des variétés de chanvre industriel disponibles et reconnues par l'Unionde fibre et ce, en raison de l’absence de marchés intéressants pour le grain (chènevis) au cours des dernières décennies. Cette tendance change, en raison de l'intérêt accru de la population quant à la qualité et l’inocuité des aliments consommés. La popularité des magasins d'alimentation naturelle et l’augmentation constante des parts de marché des produits biologiques en sont de bons exemples.

L'huile extraite du chènevis détient des attraits nutritionels exceptionnels (Deferne et Pate, 1996), particulièrement au niveau de son profile d'acides gras. L'acide linoléique (C18:2w6) et l'acide linolénique (C18:3w3), deux acides gras essentiels et polyinsaturés, composent généralement 50% à 70% et 15% à 25%, respectivement, de la teneur complète en acide gras du chènevis (Duferne and Pate, 1996). Un tel ratio de 3:1 serait optimal pour la nutrition humaine (Erasmus, 1993) et serait unique parmis les huiles d'origine végétale. L'huile de chènevis contient de plus un certain pourcentage d'acide gamma-linolénique (C18:3w6), un acide habituellement absent dans les huiles consommées par la majorité de la population (Duferne and Pate, 1996). Une bonne source de cet acide serait la spiruline (Duferne and Pate, 1996), actuellement vendu dans les magasins d'alimentation naturelle.

L'huile de chènevis peut aussi être utilisée au niveau commercial dans des marchés similaires à ceux de l'huile de lin (huile à lampe, encre pour l'imprimerie, préservatifs pour le bois) et au niveau industriel comme matière première entrant dans la fabrication de savons et détergents, entre autres. L'huile de chanvre a aussi été utilisée comme émollient dans des produits pour les soins du corps. (Duferne and Pate, 1996).

Le tourteau de chènevis peu quant à lui être écoulé sur les marchés de la consommation animale et humaine. Le tourteau contient une grande diversité d'acides aminés (incluant les 8 acides aminés nécessaires à la nutrition humaine), des hydrates de carbone ainsi que certaines quantités d'huile résiduelle (Duferne and Pate, 1996).

D' d'après Watson et Clarke (1997), la variété Uniko-B, serait la seule variété développée avec l'objectif d'un rendement accru en chénevis; un rendement pouvant aller jusqu'à 1.5 t/ha. Deux variétés développées plus récemment sont aussi sur le point d'être disponible. La variété FIN-314 (ou Finola), originaire de la Finlande, est actuellement multipliée par la compagnie Gen-X au Canada. Cet hybride dioïque résulte du croisement de deux variétés obtenues du Vavilov Research Institute (VIR), en Russie, soient les variétés VIR-313 et VIR-315. L'objectif des chercheurs finlandais était le développement d’une variété de chanvre industriel ayant une floraison hative et une résistance accrue au gel; en d'autres mots une variété pouvant tirer profit du climat finlandais (Callaway et Laakkonen, 1996). Dès les premiers essais en Finlande, le FIN-314 a démontré un rendement supérieur à la majorité des cultivars de chanvre industriel, et ce tant au niveau du rendement en huile qu’à son contenu en acide gras - spécialement l'acide gamma-linolénique (Callaway et Laakkonen, 1996). Les caractéristiques de cet hybride sont discutées plus longuement dans la section des résultats, puisque le FIN-314 fut évalué dans le cadre de ce projet.

La variété Fasamo, présenté précédemment, et éligible à la production au Canada en 1999, aurait aussi apparement un bon potentiel de production de chènevis. Aucune information officielle décrivant les propriétés de ce cultivar n'a pu être retracée.

Rendement en Chènevis

Manitoba

Le rendement en graines du chanvre industriel fut évalué aux même stations de recherche que pour la production de fibre. Le taux de semis de ces parcelles fut de 100 graines/m2 comparativement à 500 graines/m2.

Sur le site de Wawanesa (Tableau 2.4), les cultivars français Fédora 19 et Félina 34 furent de loin les plus productifs avec des rendements de 1.6 et 1.2 tonnes/ha, respectivement. Le rendement moyen à ce site était de 1.0 tonne/ha. En raison de la variabilité importante entre les données générées au site de Borden, aucune différence statistiquement significative ne fut décelée en 1996 au niveau des rendements. Cependant, les cultivars français furent de nouveaux les plus productifs avec des rendements de 1.8 t/ha pour le Fédora 19 et 1.96 t/ha pour le Félina 34. Moes (1997) mentionne toutefois que le rendement en parcelles de recherche s’avère souvent supérieur au rendement en pleins champs, et mentionne l’exemple des cultivars Zolotonosha 11 et 13 qui produisirent en pleins champs environ la moitié des rendements observés à Wawanesa en 1996.

      Tableau 2.4: Rendements en Graine Obtenus avec le Chanvre Industriel au Manitoba

      en 1996

      Parcelles de Recherche

       

      Sud-ouest du Manitoba

      (Wawanesa)

      Manitoba Central

      (Morden)

       

      Population

      Rendement en Chènevis

      Population

      Rendement en Chènevis

       

      (plants/m2)

      kg/ha

      (Plants/m2)

      kg/ha

      Zolotonosha 11

      30

      930 bc

      74 a

      1,056

      Zolotonosha 13

      34

      885 bc

      62

      1,074

      Polish 1

      32

      820 c

      74

      1,528

      Polish 2

      28

      691 c

      83

      1,561

      Fedora 19

      29

      1,567 a

      92

      1,783

      Felina 34

      37

      1,228 ab

      96

      1,963

      Moyenne

      32

      1,020

      80

      1,494

      CV (%)

      24.5

      20.4

      11.4

      26.9

      Les moyennes ayant des letres différentes à l’intérieur d’une même colonne ont une différence significative à p<0.05 selon le test LSD 

      Adapté de Moes (1997).

Ontario

Les seuls résultats disponibles datent de 1997 et furent obtenus dans le nord-ouest de l’Ontario par Scheifele. Les rendement obtenus avec le Félina, Fédrina et le Zolotonosha 13 furent de 2 025, 1 788, 1 524 kg/ha respectivement, et ce en parcelles de recherche (Scheifele, 1999).

2.4. Les Pratiques Culturales

La culture du chanvre industriel ayant été interdite durant plusieurs années au Canada, les pratiques culturales nécessaires à une production optimale sont à vrai dire inconnues. L'expérience acquise par les groupes Kenex et Hempline en Ontario depuis 3-4 ans représente la source d'information la plus suceptible d'être applicable au Québec. La revue des pratiques culturales qui suit en est largement inspirée et complétée par l'expérience européenne.

Le Marché Visé

Le choix des pratiques culturales nécessaires à la bonne marche d'une culture de chanvre industriel débute par la question suivante : lequel des marchés, de la graine ou la fibre, veut-on percer ?

La principale caractéristique de la production de graines, comparativement à la production de fibre, est le taux de semis nettement inférieur utilisé, soit environ 30 kg/ha. Ce taux varie en fonction de la taille et du poids de la semence de chaque variété mais le but ultime est d'obtenir une population finale d'environ 100-150 plants/m2. L'espacement entre les rangs est habituellement celui utilisé en production céréalière, 15-18 cm, bien que Scheifele (1997) recommande le semis en rangs de 30-36 cm, afin de fournir l'espace nécessaire au développement du grain. Il serait peut-être avisé d'expérimenter cette pratique au Québec afin de développer une recommendation claire.

La production de fibre requiert un taux de semis d'approximativement 80 kg/ha, avec comme objectif une population finale d'environ 250 plants/m2. Un espacement entre les rangs de15-18 cm, tel qu'utilisé en production céréalière, est recommandé. Il est à noter que la population tend à ce stabiliser aux environs de 250 plants/m2 en fin de saison, c.-à-d. que naturellement, la compétition entre les plants ramène la population à 250 plants/m2. Cette mortalité réduit néanmoins la qualité et la quantité de la fibre produite. (Scheifele, 1999).

Pratiques Culturales Communes

Après avoir identifié le marché visé et les quantités de semences nécessaires, les pratiques culturales adéquates aux deux productions sont relativement similaires jusqu'au temps de la récolte.

La production de chanvre industriel requiert des sols ayant une bonne fertilité et étant bien drainés, similaires à ceux utilisés pour la production de maïs-grain au Québec. Scheifele (1999) indique que le chanvre préfère les loams-sableux fertiles, bien drainés et ayant une bonne structure et un pH supérieur à 6. La production en sols lourds est possible mais résulte en un rendement moindre selon Scheifele (1999). D'autres facteurs à considérer sont notamment:

Le travail du sol nécessaire est similaire à celui pratiqué en production céréalière, l'important étant la préparation d'un lit de semence suffisament fin afin d'assurer un bon contact avec la semence. Le semis est effectué à l'aide d'un semoir à céréales, préférablement équipé de roues plombeuses, à une profondeur de 2 à 2.5 cm, aux taux de semis et espacements mentionnés précédemment. L'utilisation d'un rouleau après le semis est recommandé afin d'assurer un bon contact sol/semence.

Le moment optimum pour le semis du chanvre au Québec demeure encore à déterminer. Scheifele (1999) recommende de débuter le semis en Ontario lorsque la température du sol atteint 8-10 degrés Celsius. Le chanvre peut néanmoins germer à une température inférieure telle que 4 degrés Celsius. Les plantules de chanvre possède par ailleurs une certaine résistance au gel, bien que cette question nécessite d'être étudiée plus en profondeur.

La fertilisation requise en production chanvrière s'apparente à celle pratiquée dans la production de maïs-grain. Scheifele (1999) recommande l'application de 130 kg/ha d'azote, 40 kg/ha de phosphore et 60 kg/ha de potassium. Baxter et al. (1998) recommandent quant à eux l'application de 90 à 125 kg/ha d'azote, 23 à 75 kg/ha de phosphore et 0 à 70 kg/ha de potassium. Dans chacun des cas, la fertilité du sol, l'antécédent cultural et les applications de fumiers doivent néanmoins être pris en compte lors de la formulation des besoins en fertilisants minéraux. Ces recommandations s'appliquent de plus à la production chanvrière en général. Des recommandations spécifiques pour la production de fibre et de grain seront probablement développées à l'avenir puisque, par exemple, une surfertilisation azotée pourrait réduire la quantité de filasse produite (van der Werf, 1995).

Le chanvre est reconnu comme étant très compétitif aux mauvaises herbes, ce qui est le cas lorsque cette culture connaît une bonne implantation sur un site. Dans l'éventualité contraire, l'utilisation d'herbicides peut être nécessaire, bien qu'aucun ne soit homologué pour utilisation sur cette culture au Canada. Dix ingrédients actifs furent évalués en 1997 par le Collège de Ridgetown en Ontario (Tableau 2.5), et seulement deux des produits évalués n'eurent aucun effet sur les plants de chanvre. L'effet de ces produits sur le rendement final du chanvre n'était par contre pas mentionné. La production de chanvre pour le chènevis s'avère généralement plus susceptible aux mauvaises herbes en raison du taux de semis inférieur utilisé.

Tableau 2.5: Évaluation de Différents Herbicides en Vue d'une Utilisation en Culture Chanvrière

Ridgetown College, Université de Guelph

Ontario, 1997

Nom Commercial

Ingrédient Actif

Taux d'Application

Effets Observés sur les Plants de Chanvre

Select + Amigo (1%)

Clethodim

0.25 l/ha

Aucun effet

Pursuit

Imazethapyr

0.30 l/ha

Jaunissement des plants; croissance retardée/plants rabougris

Blazer

Acifluorfen

2.50 l/ha

Brûlure des feuilles

Exel Super

Fenozaprop-p-ethyl

0.60 l/ha

Dommage sommaire; brûlure partielle des plants

MCPA

MCPA (amine)

0.50 kg/ha

Croissance retardée; jaunissement; plants rabougris

Lentagrain

Pyridate

1.50 kg/ha

Brûlure des feuilles

Assure + Canplus (1%)

Quizalofop-ethyl

1.20 l/ha

Décoloration des plants (blanc)

Basagran Forte

Bentazon

2.00 l/ha

Brûlure complète des plants

Venture + Turbocharge

Fluzaifop-p-butyl

0.75 kg/ha

Brûlure partielle des plants

Poast + Assist (1%)

senthoxydim

2.50 l/ha

Aucun effet

Source: Baxter et al. (1998)

 

 

Au niveau des maladies fongiques rencontrées en production chanvrière, la moisissure grise (Botrytis cinerea) et la flétrissure sclérotique (sclerotinia sclerotiorum) sont les plus répandues. La moisissure grise est rencontrée dans les régions tempérées, dans des conditions humides et de températures fraîches à moyennes. La moisissure forme un mycélium gris-brun sur la tige des plants de chanvre et par la production d'enzymes, développe des lésions rendant le plant susceptible à la verse (McPartland, 1996). La flétrissure sclérotique se développe initialement comme une lésion, de nature humide, sur les tiges et les branches du plant chanvre (McPartland, 1996). Les régions affectées se distinguent par la suite par leur apparence squelettique tandis que la moelle (la chènevotte) de la plante se remplit d'un mycélium de couleur blanche et d'allure semblable à du coton. La moutarde (Brassica sp.) serait un des vecteurs de cette maladie fongique. Le traitement de ces maladies à l'aide de fongicides n'est pas pratique courante d'après la littérature consultée. Les seuls résultats documentés (de Meijer, 1995) proviennent de Hollande, où des applications alternées et répétées de vinchlozolin et iprodion se sont avérée efficaces. Plus de détails n'étaient pas disponibles.

Au niveau des baisses de rendements découlant de la présence d'insectes, seule la légionnaire Bertha (Mamestra configurata) a été reconnue comme pouvant être très dommageable au Manitoba (Moes 1997). Autrement, aucun dommage sérieux de la part d'insectes n'a été répertorié au Canada à ce jour.

La Récolte

Le moment et la procédure de récolte diffère diamétralement que l'on vise la production de grain ou de fibre. La récolte uniquement pour la production de fibre s'effectue entre le début et la fin floraison, et obligatoirement avant le début du développement du grain. La qualité de la fibre diminue avec le stade maturité de la plante: les fibres deviennent plus dures et grossières. Le moment exact entre le début et la floraison semble dépendre des variétés et des marchés visés. Cet aspect de la récolte nécessite d'être d'étudié plus en profondeur afin de développer des recommandations à l'intention des producteurs agricoles du Québec.

La récolte du chanvre pour la production de fibre débute par la fauche des plants à l'aide d'une andaineuse à barre de coupe (non-rotative) ou d'une faucheuse-conditionneuse. L'équipement traditionnel nécessite habituellement certaines modifications, spécialement afin d'éviter l'enroulement des fibres de chanvre aux pièces motrices de l'équipement en question. La teneur relativement élevée en silice de la fibre de chanvre réduit aussi la durée vie de certaines pièces d'équipements tels que les couteaux de la barre de coupe. La fibre est par la suite laissée sur le champ soit pour quelques jours afin de réduire son taux d'humidité et assurer sa préservation en entreposage, ou pour une période pouvant aller jusqu'à 4-5 semaines afin de permettre au phénomène de rouissage de faire son oeuvre.

Le rouissage est un processus de décomposition grâce auquel la pectine qui lie les fibres à la partie non fibreuse de la tige est éliminée par l'action des bactéries et des moisissures (Reichert, 1994). En d'autres mots, le rouissage permet la séparation de la filasse de la chènevotte. Le processus de rouissage est généralement effectué en champs et est alors tributaire de l'effet de la pluie et de la rosée. Les régions sèches sont donc peu favorables au rouissage. Les andains de chanvre doivent être retournés à quelques occasions durant le processus afin de favoriser un rouissage uniforme des fibres. Le recours au rouissage est nécessaire pour les marchés n'utilisant que la filasse et pour le marché du textile.

La récolte est habituellement mise en balles rondes ou rectangulaires de grandes dimensions. La fibre destinée au textile doit par contre être intacte et différents types d'équipement peuvent être nécessaires. Plus d'information sur la logistique de la récolte est présentée dans un volet connexe à cette étude piloté par ChanvrEstrie.

Le chènevis arrive généralement à maturité 40 jours suivant la récolte pour la fibre. La récolte s'effectue à l'aide d'une moissoneuse-batteuse, de type conventionnelle préférablement, en maintenant toutefois la barre de coupe assez élevée afin de minimiser la quantité de tiges manipulées par l'équipement. La récolte doit débuter lorsque le taux d'humidité du chènevis atteint 12 à 15% et que 75% à 80% des grains ont atteint une couleur brune (Scheifele, 1999). En deçà de 12% d'humidité, les grains commenceront à tomber au sol et seront endommagés lors de la récolte. Tout comme dans le cas de l'équipement de récolte de la fibre, certaines modifications à la moissonneuse-batteuse sont nécessaires afin d'éviter l'enroulement des fibres aux pièces motrices de l'équipement.

Suivant le passage de la moissoneuse-bateuse, les tiges sont coupées et récoltées en utilisant l'équipement et la procédure présentés précédemment pour la production de fibre. La qualité de la fibre ainsi récoltée est alors moindre et définitivement impropre à la production textile.

2.5 Conclusion

La revue de littérature démontre clairement que la production du chanvre industriel au Québec demandera un effort de recherche important au cours des années à venir. La régie de culture dans son ensemble, et ce pour les différents marchés, nécessite d'être expérimentée afin de développer des recommandations claires. La majorité des variétés actuellement disponibles en Europe et au Canada ont été développées pour la production de fibre. La compagnie Hempline du sud de l'Ontario, qui se spécialise exclusivement dans la production de fibre, favorise l'utilisation de variétés hongroises en raison de leur floraison tardive et de leur rendement accru. Cette stratégie devrait être évaluée au Québec. Quant à la production de chènevis, elle demandera vraisemblablement l'utilisation de variétés à floraison relativement hâtive afin d'assurer la maturité du chènevis produit. Les variétés françaises, le FIN-314 et le Fasamo devraient donc être évalués en priorité.

3. MÉTHODOLOGIE

Le but de ce projet était d‘évaluer l‘effet de trois pratiques culturales sur la productivité du chanvre industriel, soit la date d‘ensemencement, la densité de semis, et la date de récolte. L‘étude évaluait deux cultivars (Fedora 19 et Zolotonosha 11) sur un site de 4 hectares situé à Compton. Un autre cultivar (FIN-314) fut aussi évalué, pour la producton de chènevis, sur un site de 4 hectares situé à Ayers Cliff. Les deux sites sont situés dans la région de l'Estrie au Québec.

Étude 1: Effet de la date d‘ensemencement sur le rendement

Les deux cultivars Fedora 19 et Zolotonosha 11 furent ensemencés à une densité de semis de 85 kg/ha aux dates suivantes: 2 juin, 25 juin et 6 juillet 1998. Le semis fut effectué à l’aide d’un semoir à céréales à roue plombeuses (profondeur de 3 cm et en rang de 15 cm). L‘étude fut établie selon un plan en parcelles partagées, avec les dates d‘ensemencement comme traitements principaux et les deux cultivars comme sous-traitements. Le dispositif expérimentale consista en 3 blocs mesurant 45 m par 15 m, chacun divisé en 3 parcelles principales (dates d‘ensemencement) mesurant 15 m par 15 m. Chaque parcelle principale fut subdivisée en 2 sous-parcelles (cultivars) mesurant 5 m par 15 m. Les sous-parcelles furent attribuées au hasard dans chaque traitement principal. Ces derniers furent aussi assignés au hasard dans chaque bloc. Les blocs étaient séparés par des allées larges de dix mètres afin de permettre à la machinerie agricole de circuler et d'opérer autour des terrains (voir Annexe 1).

Des échantillons (2 rangs de 5 m chacun) de Fedora 19 et Zolotonosha 11 furent récoltés à la main 80 jours après chaque date d’ensemencement afin d’évaluer le rendement total en biomasse. A la maturité des plants, un autre échantillonnage fut effectué afin d’évaluer le rendement en chènevis (graines).

Étude 2: Densité de semis et rendement

Les deux cultivars (Fedora 19 et Zolotonosha 11) furent ensemencés le 2 juin selon des densités convenables à la culture du chanvre industriel pour la production de fibre. Le semis fut effectué à l’aide d’un semoir à céréales à roues plombeuses (profondeur de 3 cm et en rang de 15 cm).

L‘étude fut établie selon des blocs avec répartition au hasard. Le dispositif expérimentale consista en 3 blocs mesurant 30 m par 15 m, chacun divisé en 6 parcelles mesurant 5 m par 15 m. Chaque parcelle s'est vue attribuer au hasard l’un des 6 traitements suivants:

85 kg/ha

100 kg/ha

85 kg/ha

100 kg/ha

Les blocs étaient séparés par des allées larges de dix mètres afin de permettre à la machinerie agricole de circuler et d'opérer autour des terrains. La récolte fut effectuée le même jour pour tous les traitements, soit 80 jours après la date d’ensemencement. Des échantillons (2 m par 5 m chacun) furent récoltés à la main dans chaque parcelle afin d’évaluer le rendement en fibre (voir Annexe 1).

Étude 3: Date de récolte et rendement

Partie A:

Les deux cultivars (Fedora 19 et Zolotonosha 11) furent ensemencés le 2 juin à 70 kg/ha au site de Compton puis récoltés aux dates suivantes:

L‘étude fut établie selon des blocs avec répartition au hasard. L’étude utilisa les parcelles ensemencées le 2 juin 1998 dans le cadre de l’Étude 2: Densité de semis et rendement. Des échantillons (2 rangs de 5 m chacun) furent récoltés à la main afin d’évaluer le rendement en fibre et en chènevis, dans les parcelles qui étaitent semis à 70 kg/ha.

Partie B:

La variété Finola-314 (FIN-314), dévelopée en Finlande pour la production de chènevis et d'huile fut évaluée sur une superficie de 4 hectares à Ayers Cliff. La culture fut ensemencée le 29 juin 1998 à l'aide d'un semoir à céréales à une profondeur de 1-2 cm et un taux de semis de 30 kg/ha. Dix échantillons de 1 m2, sélectionnés au hasard, furent récoltés au mois d'octobre afin d’évaluer le rendement en fibre et en chènevis.

4. RÉSULTATS

4.1 Terminologie

Les termes suivants sont utilisés selon la définition qui suit:

Il est à noter que les analyses statistiques qui suivent utilisent un seuil de probabilité de p< 0.05.

4.2 Donnés Météorologiques

Globalement, les températures observées dans la région entre mai et octobre furent légèrement plus élevées que la moyenne alors que les précipitations furent inférieures (86 mm en moins) (Tableau 4.1). Plus précisément, les mois de mai, août, septembre et octobre furent plus secs que la normale alors que le mois de juin à reçu des précipitations au-dessus de la normale. Au niveau des unités thermiques maïs durant cette même période, la région aurait eu accès à 2862 UTM d'après les données recueillies auprès de la station météorologique de Sherbrooke.

 

 

 

Tableau 4.1: Données Météréologiques Mensuelles

Sherbrooke, 1998

 

Température Moyenne

oC

Température Normale

oC

Précipitations

 

mm

Précipitations Normale

mm

Unités Thermiques Maïs Mensuelles

Mai

14.4

10.8

70.5

94.2

453.4

Juin

16.5

15.5

114.0

100.5

560.4

Juillet

18.3

18.0

117.5

116.7

673.0

Août

18.0

16.6

116.5

130.5

656.9

Septembre

13.7

12.0

65.5

98.6

428.6

Octobre

7.3

6.4

62.0

91.4

90.0

Moyenne/Total

14.7

13.2

546.0

631.9

2862.3

 

 

4.3 Préparation du Sol et Semis

Il importe de spécifier en premier lieu que les deux sites utilisés lors des études de 1998 sont situés sur des fermes certifiées biologiques, ce qui a des effets sur les pratiques culturales préconisées. La préparation du sol au site de Compton consistait en l'utilisation de disques lourds à l'automne et au passage répété d'un vibroculteur au printemps. Le semis fut effectué à l'aide d'un semoir à céréales équipé de roues plombeuses et de sillons espacés aux 15 cm. La préparation du sol au site d'Ayers Cliff consista au passage d'une herse à la fin avril et, en raison du retard dans la livraison de la semence de FIN-314, de passages subséquents à intervalles de 12 jours, débutant le 21 mai. Le semis fut effectué à l'aide d'un semoir à céréales suivi d'un rouleau afin de compacter le sol.

4.4 Fertilisation

Le site de Compton reçu l'application de 23 372 l/ha de lisier de porc à l'automne 1997. Vingt kilogrammes de phosphore et 80 kg/ha de potassium furent appliqués au printemps 1998. Le site d'Ayers Cliff reçu du compost au début mai, suivit de 2 t/ha de cendre de bois. Au début juin, 30 tonnes de fumier de bovins furent appliquées sur le site, soit environ 8.8 tonnes/ha.

4.5 Mauvaises Herbes et Insectes Répertoriés

Les mauvaises herbes et les insectes ne causèrent aucun problème important aux plantations en 1998. Au site de Compton, les mauvaises herbes étaient surtout confinées aux abords des champs. Les mauvaises herbes qui se trouvaient dans les parcelles étaient composées principalement de moutarde (Brassica sp.), topinambour (Helianthus tuberosus), et d'ortie (Ortica sp.). La présence d'insectes ressemblant au chrysomèles des racines du maïs au niveau des inflorescences fut aussi notée. Au site d'Ayers Cliff, des plants de luzerne, de radis huileux (Raphanus sativus L.) et de chénopodes (Chenopodim album L.) et quelques îlots de chiendent (Agropyron repens) furent répertoriés.

4.6 Étude 1: Effet de la Date d'Ensemencement sur le Rendement

Objectif: Déterminer l'influence de la date de semis sur le rendement en fibre et la production de chènevis.

Rendement en Fibre

Il est important de noter à prime abord que le site de Compton était relativement vallonneux, donc non uniforme en termes de conditions de croissance. Les échantillons prélevés révèlent que la date de semis n'eut aucun effet significatif sur le rendement en fibre 80 jours après chaque date de semis, et ce pour les deux cultivars. Le haut degré de variabilité entre chaque échantillon (Figure 4.1) peut cependant avoir influencé ces résultats, tel que discuté brièvement plus loin. Au niveau du rendement entre les deux cultivars, aucune différence significative n'a été décelée non plus. Le Fédora 19 a néanmoins produit 28.4% plus de fibre que le Zolotonosha 11. Le Tableau 4.2 présente les rendements obtenus.

 

 

Figure 4.1: Rendement moyen et erreur-type observés dans le cadre de l'étude 1.

Tableau 4.2: Évaluation du rendement en fibre

80 jours après l'ensemencement

Étude 1, Compton, Qc, 1998

Date

Cultivars

Rendement Moyen

(tms/ha)

2 juin

Fédora 19

9.02 a

Zolotonosha 11

5.81 a

25 juin

Fédora 19

8.17 a

Zolotonosha 11

7.21 a

6 juillet

Fédora 19

6.71 a

Zolotonosha 11

5.23 a

Moyenne

Fédora 19

7.83 a

Zolotonosha 11

6.10 a

Pour chaque date de récolte, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieur d'une même date de semis ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

Lorsque les parcelles ensemencées le 2 juin eurent atteint leur pleine maturité, le 4 octobre (124 jours après le semis), des échantillons de chènevis furent prélevés afin d'évaluer le rendement. Les parcelles ensemencées le 25 juin et le 6 juillet n'atteignirent jamais la pleine maturité et furent conséquemment détruites en fin d'octobre. D'après les résultats obtenus cette année, il semble que pour les deux cultivars, les dates de semis étudiées n'affectent pas le rendement en fibre 80 jours après le semis, soit environ vers la fin de la floraison, mais seul un semis en début juin permet la production de chènevis. Le chanvre industriel cultivé pour la production de papier cigarette en France est récolté lorsque la culture atteint le stade de fin floraison.

L'analyse statistique a de plus révélé une interaction "bloc*date de semis" pour la production de fibre. Cette interaction confirme que le site n'était pas homogène en termes de conditions de croissance, ce qui augmenta la variabilité des résultats obtenus. Par exemple, pour la date de semis du 2 juin (Figure 4.2), les rendements du premier bloc étaient plus élevés que ceux du deuxième. Par contre, pour le semis du 25 juin, le deuxième bloc eu le rendement le plus élevé.

 

 

Figure 4.2: Effet de bloc*date de semis sur les rendements dans le cadre de l'étude 1

 

 

La variabilité importante entre les résultats pourrait aussi masquer la tendance à la baisse du rendement en fibre observé avec le cultivar Fédora 19 pour les dates des semis plus tardives (Figure 4.1), alors que l'analyse statistique ne révèle aucune différence significative.

Rendement en Chènevis

Seul le chanvre ensemencé le 2 juin permit de rendre le chènevis à maturité, tel que discuté précédemment. La production du Fédora 19 fut de 0.97 tms/ha et de 0.49 tms/ha pour le Zolotonosha 11. Ces rendements n'étaient toutefois pas significativement différents (Tableau 4.3). L'indice de récolte, soit le rendement en grain par rapport à la biomasse totale, était approximativement 9.7% et 7.8% pour le Fédora 19 et le Zolotonosha 11. L'indice de récolte du blé de printemps varie autour de 41% et celui du maïs-grain autour de 50%.

 

Tableau 4.3: Rendement en Chènevis, en Tige, et Indice de Récolte

Étude 1, Semis du 2 juin 1998

Date de Semis

Date de Récolte

Variété

Rendement en Chènevis

(tms ha-1)

Rendement en fibre au 20 août

(tms ha-1)

Indice de Récolte

%

2 juin

4 octobre

Fedora-19

0.97 a

9.02 a

9.7 a

2 juin

4 octobre

Zolotonosha-11

0.49 a

5.81 a

7.8 a

 

 

Hauteur des Plants

La hauteur des plants 80 jours après l'ensemencement fut mesurée et l'analyse statistique ne révéla aucune différence significative tant entre les cultivars que les dates de semis (Tableau 4.4).

Tableau 4.4: Évaluation de la Hauteur des Plants

80 jours après l'ensemencement

Étude 1, Compton, Qc, 1998

Date

Cultivars

Hauteur Moyenne

(m)

2 juin

Fédora 19

1.48 a

Zolotonosha 11

1.36 a

25 juin

Fédora 19

1.41 a

Zolotonosha 11

1.41 a

6 juillet

Fédora 19

1.38 a

Zolotonosha 11

1.24 a

Moyenne

Fédora 19

1.41 a

Zolotonosha 11

1.34 a

Pour chaque date de récolte, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieur d'une même date de semis ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

 

Population Finale et Mortalité

La population finale de chaque variété au moment de la récolte fut évaluée, incluant un décompte du nombre de plants ayant souffert de mortalité. Les résultats sont présentés au Tableau 4.5.

 

Tableau 4.5: Mortalité et Population à la Récolte en Fonction de la Date de Semis,

80 jours après l'ensemencement

Étude 1, Compton, Qc, 1998

Date de Semis

Cultivars

Population Finale

(Plants vivants par m2)

Mortalité

(%)

2 juin

Fédora 19

228 a

4 b

Zolotonosha 11

110 a

12 a

25 juin

Fédora 19

110 a

24 a

Zolotonosha 11

76 a

29 a

6 juillet

Fédora 19

125 a

10 a

Zolotonosha 11

70 a

21 a

Pour chaque date de récolte, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieur d'une même date de semis ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

 

Pour chacune des dates de semis, la population finale et le taux de mortalité entre les deux variétés n'étaient pas significativement différents, à l'exception du taux de mortalité pour le semis du 2 juin. Dans ce cas, le taux de mortalité était significativement inférieur dans le cas du Fédora 19, ce qui s'explique probablement par le développement tôt en saison de moisissure dans le Zolotonosha 11 pour cette date de semis - probablement de la flétrissure sclérotique.

Heures d'Illumination et UTM

Afin d'aider à l'analyse des résultats, la date du début de floraison et le nombre d'heures d'illumination à ce moment furent identifiées (Tableau 4.6). Les unités thermiques maïs (UTM) disponibles durant la saison de croissance 1998 sont également présentées. Les heures d’illumination et les UTM furent calculées des données obtenues de la Station de recherche de Sherbrooke, gérée par Environnement Canada. Le nombre d'heures d'illumination entraînant la floraison serait de 15.9 heures pour le Zolotonosha 11 et 15.5 heures pour le Fédora 19 selon les informations compilées en 1998.

Tableau 4.6: Nombre de Jours et Heures d'Illumination à la Floraison

Étude 1, Compton, Qc, 1998

Cultivars

Date de Semis

Début de la Floraison1

Nombre de Jours à la Floraison

Nombre d'heures d'Illumination

Unité Thermiques totales du semis à la floraison

Zolotonosha 11

2 juin

23 juillet

51

16.2

1070

 

25 juin

30 juillet

35

16.0

786

 

6 juillet

10 août

35

15.4

802

           

Fédora 19

2 juin

30 juillet

58

16.0

1211

 

25 juin

6 août

42

15.6

927

 

6 juillet

20 août

45

14.9

822

Note 1: La floraison de chaque parcelle fut considérée comme ayant débuté lorsque 10% des  plants avait débuté la floraison.

 

4.7 Étude 2: Densité de semis et rendement

Objectif: Déterminer l'influence de la densité de semis sur le rendement en fibre.

Rendement en Fibre

Les échantillons prélevés révèlent que la densité de semis n'eut aucun effet significatif sur le rendement en fibre 80 jours après la date d'ensemencement, et ce pour les deux cultivars. La variabilité associée aux résultats est présentée à la Figure 4.3. Comparé l'un à l'autre, les deux cultivars ne différaient pas en termes de rendement (Tableau 4.7). Néanmoins, le Fédora 19 obtint un rendement en fibre moyen de 10.7% supérieur au Zolotonosha-11. La population finale moyenne, c.-à-d en tenant compte des différents taux de semis, étaient significativement plus élevé pour le Fédora 19. Il est possible que la variabilité des résultats de rendement ait masqué cette tendance lors de l'analyse des rendements.

 

Tableau 4.7: Évaluation du Rendement en Fibre

80 jours après l'ensemencement

Étude 2, Compton, Qc, 1998

Densité de Semis (kg/ha)

Cultivars

Rendement Moyen

(tms/ha)

70

Fédora 19

6.35 a

Zolotonosha 11

6.71 a

85

Fédora 19

7.39 a

Zolotonosha 11

5.63 a

100

Fédora 19

7.34 a

Zolotonosha 11

6.71 a

Moyenne

Fédora 19

7.03 a

Zolotonosha 11

6.35 a

Pour chaque densité de semis, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieur d'une même colonne ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

 

Figure 4.3: Rendement moyen et erreur-type observés dans le cadre de l'étude 2, pour différents taux de semis.

 

 

Hauteur des Plants

Les densités de semis et les cultivars n'eurent de plus eu aucun impact significatif sur la hauteur des plants (Tableau 4.8).

Tableau 4.8: Évaluation de la Hauteur des Plants

80 jours après l'ensemencement

Étude 2, Compton, Qc, 1998

Densité de Semis (kg/ha)

Cultivars

Hauteur Moyenne

(m)

70

Fédora 19

1.46 a

Zolotonosha 11

1.47 a

85

Fédora 19

1.50 a

Zolotonosha 11

1.34 a

100

Fédora 19

1.40 a

Zolotonosha 11

1.42 a

Moyenne

Fédora 19

1.45 a

Zolotonosha 11

1.41 a

Pour chaque densité de semis, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieure d'une même colonne ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

 

Population Finale et Mortalité

Un des volets de l'étude 2 consistait à évaluer sommairement l'effet de différents taux de semis sur la population au temps de la récolte. L'utilisation de taux de semis plus élevés peut ne pas résulter en une population accrue à la récolte si la compétition entre les plants crée de la mortalité et/ou crée un microclimat plus favorable au développement de maladies fongiques.

Contrairement à ce qui fut anticipé, la semence utilisée lors de cette étude comportait une certaine quantité de plants dioïques. Les plants mâles mourant dès la fin de la pollinisation, le taux de mortalité observé au moment de la récolte fut ainsi augmenté. La présence de flétrissure sclérotique fut notée dans certaines parcelles mais son effet véritable sur la population finale est difficile à évaluer en raison de la sénescence des plants mâles.

Le Tableau 4.9 présente la proportion de plants morts et la population au moment de la récolte des parcelles, 80 jours après la date d'ensemencement. Le Fédora 19 montra un taux de mortalité moyen de 17%, alors que le Zolotonosha 11 eut un taux moyen de 29%. La population finale du Fédora 19 augmenta avec l'augmentation du taux de semis, ce qui ne fut pas le cas avec le Zolotonosha 11. D'après ces résultats, s'il s'avère que la qualité de la fibre s'améliore avec l'utilisation d'une densité accrue, le Fédora 19 serait un meilleur choix que le Zolotonosha 11.

 

 

Tableau 4.9: Mortalité et Population à la Récolte en Fonction de la Densité de Semis

80 jours après la date d'ensemencement

Étude 2, Compton, Qc, 1998

Densité de Semis (kg/ha)

Cultivars

Population Finale

(Plants vivants par m2)

Mortalité

(%)

70

Fédora 19

132 a

25 a

Zolotonosha 11

139 a

19 a

85

Fédora 19

175 a

17 a

Zolotonosha 11

119 a

37 a

100

Fédora 19

238 a

9 b

Zolotonosha 11

116 b

30 a

Moyenne

Fédora 19

185 a

27 a

Zolotonosha 11

127 b

34 a

Pour chaque densité de semis, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieure d'une même colonne ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

 

4.8 Étude 3: Date de récolte et rendement

Partie A

Objectif: Déterminer l'influence de la date de récolte sur le rendement en fibre et chènevis des variétés Fédora 19 et Zolotonosha 11.

Rendement

Il s'est avéré que le chènevis n'avait pas atteint sa pleine maturité à aucune des trois dates de récolte prévue. Les données de rendement obtenues représentent donc le rendement en fibre. Les échantillons prélevés révèlent qu'à chacune des dates de récolte, il n'y avait pas de différence significative entre les deux cultivars au niveau du rendement en fibre (Tableau 4.10 et Figure 4.4). Le rendement moyen pour le Fédora 19 était de 6.1 tms/ha et 5.9 tms/ha pour le Zolotonosha 11.Puisque le rendement en fibre s'est avéré constant entre le 65ième et 95ième jours suivant l'ensemencement, il serait souhaitable dans l'avenir de déterminer quels sont les changements s'effectuant, parallèlement, au niveau de la qualité de la fibre produite.

 

 

Tableau 4.10: Évaluation du Rendement en Fibre semis à 70 kg/ha, 65, 80 et 95 jours après l'ensemencement

Étude 3, Compton, Qc, 1998

Date de Récolte

Cultivars

Rendement Moyen

(tms/ha)

65 jours

(6 août)

Fédora 19

5.68 a

Zolotonosha 11

5.62 a

80 jours

(20 août)

Fédora 19

6.35 a

Zolotonosha 11

6.71 a

95 jours

(4 septembre)

Fédora 19

6.16 a

Zolotonosha 11

5.23 a

Moyenne

Fédora 19

6.06 a

Zolotonosha 11

5.85 a

Pour chaque date de récolte, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieur d'une même date de récolte ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

Figure 4.4: Rendement moyen et erreur-type des rendements observés dans le cadre de l'étude 3

Hauteur des Plants

Pour chacune des dates de récolte, il n'y eut aucune de différence significative entre les cultivars au niveau de la hauteur des plants (Tableau 4.11).

 

 

Tableau 4.11: Évaluation de la Hauteur des Plants semis à 70 kg/ha, 65, 80 et 95 jours après l'ensemencement

Étude 3, Compton, Qc, 1998

Date de Récolte

Cultivars

Hauteur Moyenne

(m)

65 jours

(6 août)

Fédora 19

1.37 a

Zolotonosha 11

1.38 a

80 jours

(20 août)

Fédora 19

1.46 a

Zolotonosha 11

1.50 a

95 jours

(4 septembre)

Fédora 19

1.31 a

Zolotonosha 11

1.25 a

Moyenne

Fédora 19

1.38 a

Zolotonosha 11

1.38 a

Pour chaque date de récolte, les moyennes ayant des lettres différentes à l'intérieur d'une même date de récolte ont une différence significative à p< 0.05 selon le test LSD.

 

 

Population Finale et Mortalité

Pour chacune des dates de récolte, il n'y eut aucune différence significative entre les variétés tant au niveau de la population finale que de la mortalité (Tableau 4.12).

 

 

Tableau 4.12: Mortalité et Population à la Récolte (semis à 70 kg/ha) en Fonction de la Date de Recolte

Étude 3, Compton, Qc, 1998

Date de Recolte

Cultivars

Population Finale

(Plants vivants par m2)

Mortalité

(%)

6 août

Fédora 19

130 a

17 a

Zolotonosha 11

109 a

17 a

20 août

Fédora 19

134 a

25 a

Zolotonosha 11

141 a

19 a

4 septembre

Fédora 19

129 a

27 a

Zolotonosha 11

110 a

27 a

Moyenne

Fédora 19

131 a

29 a

Zolotonosha 11

120 a

23 a

 

 

Partie B

Objectif: Déterminer le rendement en chènevis et en fibre du cultivar FIN-314.

Rendement en Chènevis

Il est premièrement intéressant de noter que comparativement aux Fédora 19 et Zolotonosha 11, le Finola-314 a tout de même été en mesure de rendre son chènevis à maturité malgré sa date de semis tardive (29 juin).

Le Finola-314 était très court sur tige et par conséquent ne laissait que peu de fibre récoltable. La date de semis tardive explique probablement ce phénomène, quoique ce cultivar soit naturellement à paille courte. La production de ce cultivar au cours des années à venir confirmera ou non le phénomène observé cette année.

La production en chènevis du FIN-314 varia entre 0.83 tms/ha et 1.93 tms/ha, avec une moyenne de 1.27 tms/ha (Tableau 4.13). Tout en reconnaissant le fait que le Finola-314 fut ensemencé sur un site différent des deux autres variétés, cette variété, ensemencée tardivement (le 29 juin), produisit 30% de plus de chènevis que le Fédora 19 et près de 160% de plus que le Zolotonosha 11, tous deux ensemencés le 2 juin. .

 

 

Tableau 4.13: Rendement en Chènevis, en Tige et Indice de Récolte Pour le Cultivar Finola-314

Ayers Cliff - 1998

Échantillon

Rendement en Chènevis

(tms ha-1)

Rendement en Tige

(tms ha-1)

Indice de Récolte

%

1

1.50

2.18

40.1

2

1.35

2.30

40.0

3

1.42

2.02

41.3

4

0.83

1.02

44.9

5

1.93

2.75

41.2

6

1.27

1.68

43.1

7

1.00

1.15

46.5

8

0.96

1.29

42.7

9

1.00

1.38

42.0

10

1.41

1.76

44.5

Moyenne

1.27

1.75

42.1

 

Rendement en fibre et Indice de Récolte

Le rendement en fibre moyen du Finola-314 fut évalué à 1.75 tms/ha (Tableau 4.13), ce qui est nettement inférieur au rendement observé au site de Compton avec le Fédora 19 et le Zolotonosha 11. L'indice de récolte du Finola-314 fut par contre approximativement 42% comparativement à 9.7% pour le Fédora 19 et 7.8% pour le Zolotonosha 11. Le Finola-314 alloue donc beaucoup plus d'énergie à la production de grain, ce qui est idéal lorsque cette production est visée, sans compter la facilité avec laquelle le grain est récolté en raison de la courte tige de cette variété.

Analyse du Chènevis Récolté

Un échantillon de chèvenis fut analysé par les laboratoires Maxxam. La teneur en THC était de 0.14%, bien en deçà de la limite permise de 0.3%. Tel qu'anticipé, le taux de protéine (31%) de la graine et la teneur en acide gras GLA (4.7%) de l'huile se sont avérés plus élevés que les teneurs habutuellement rencontrées pour les variétés de chanvre (Tableau 4.14).

 

 

Tableau 4.14: Résultats d'Analyse du Chènevis Provenant de la Variété Finola-314.

Paramètre

Finlande 1996

%

Finlande 1997

%

Ayers Cliff, Qc

1998

%

Valeur Typique pour le Chanvre*

%

Protéine (graine)

nd

nd

31.0

23.0

Contenu en Huile

36.9

37.0

nd

35.0-40.0

Palmitique

5.7

7.6

6.6

6.0-7.5

Palmitoleique

0.14

nd

0.1

nd

Stearique

2.22

2.1

2.1

1.6-3.0

Oleique

8.8

9.2

7.5

10.0-15.0

Linoleique

56.3

54.8

53.8

55.0-59.0

GLA

4.0

4.1

4.7

1.0-2.0

Linolenique

20.9

19.2

19.9

20.0-21.0

Arachidique

0.8

nd

0.8

nd

Eicosenoique

0.4

nd

0.5

nd

Eicosadenoique

0.5

nd

0.1

nd

Behenique

0.3

nd

0.4

nd

Lignocerique

0.26

nd

0.2

nd

Stereadonique

nd

1.7

1.8

1.0

*Source: Shazam Farm (1999).

nd= non disponible

 

 

4.9 Coûts de Production

Bien qu'une analyse détaillée des coûts de production encourrus en culture chanvrière ne fasse pas partie du mandat confié à REAP, une ventilation sommaire est présentée dans les paragraphes qui suivent afin de situer le lecteur.

Le principal coût de production en production chanvrière est relié à l'achat de la semence, encore majoritairement importée d'Europe. Le prix actuel varie généralement entre 10-12 $/kg, soit 800$-1 000$ de l'hectare pour la production de fibre - supposant un taux de semis de 80 kg/ha. Le total des frais variables encourrus pour la production de fibre est évalué à 1 177 $/ha (Tableau 4.15). Le coût de la semence represente donc, actuellement, de 70 à 75% des frais variables encourus. En faisant l'hypothèse qu'une fois les techniques de production mises au point, le rendement moyen en fibre atteindrait 7.5 tms/ha, les frais variables par tonne produite serait de 157$.

Tableau 4.15: Estimation des Frais Variables Encourus en Production Chanvrière

Postes de Dépenses

Production de Fibre Seulement

Frais - $/ha

Production de Chènevis Seulement (FIN-314)

Frais - $/ha

Semence (80 kg/ha x 11 $/kg)

880.00

--

Semence (30 kg/ha x 11 $/kg)

--

330.00

Fertilisants (112-50-50)

190.00

190.00

Préparation du sol

44.00

44.00

Semis

12.00

12.00

Application Fertilisants

2.00

2.00

Fauche des tiges

11.00

--

Moissonneuse-Batteuse

--

20.00

Ratelage

8.00

--

Pressage Balles Rondes

16.00

--

Transport des Balles sur la Ferme

4.00

--

Transport du Grain à la Ferme

--

3.00

Corde

10.00

--

Total des Frais Variables

1177.00

601.00

Frais Variables par Tonne Produite

157.00a

462.00b

a assume un rendement en tige de 7.5 tms/ha.

b assume un rendement en chènevis de 1.3 tms/ha.

 

 

Dans le cas de la culture du FIN-314, le total des frais variables est évalué à 601$, où les frais de semence représentent environ 55% de ces frais. En faisant l'hypthèse qu'un rendement en chènevis de 1.3 tms/ha serait atteint régulièrement, les frais variables par tonne produite serait de 462$.

La réduction du coût de la semence et l'augmentation des rendements apparaissent donc comme les principales priorités de recherche au cours des années à venir en vue de commercialiser cette culture à grande échelle.

4.10 Évaluation du Rendement en Filasse et Chènevotte

La quantité et la qualité de la filasse et chènevotte produites auront effet déterminant dans la commercialisation de la culture du chanvre au Québec. En utilisant le rendement moyen en fibre observé dans le cadre de l'étude 2 et le pourcentage de filasse répertorié pour le Fédora 19 et le Zolotonosha 11 dans la littérature européenne, le rendement à l'hectare de filasse, de filasse utilisable pour le textile et de chènevotte fut évalué (Tableau 4.16).

 

 

Tableau 4.16: Évaluation Sommaire du Rendement en Filasse et Chènevotte des Variétés

Étudiées en 1998

Variétés

Rendement Moyen en Fibre Selon l'Étude 2

Rendement en Filasse

Rendement en Filasse Disponible pour le Textile

Rendement en Chènevotte

 

tms/ha

%

tms/ha

%

Tms/ha

%

tms/ha

Fédora 19

7.03

36

2.53

20

1.41

64

4.50

Zolotonosha 11

6.35

35

2.22

25

1.59

65

4.13

 

 

Selon les pourcentages de filasse utilisés, le Fédora 19 aurait produit légèrement plus de filasse que le Zolotonosha 11 (2.53 tms/ha versus 2.22 tms/ha) mais aurait toutefois produit légèrement moins de filasse pour l'industrie textile (1.41 tms/ha versus 1.59 tms/ha). Le rendement en fibre seul n'est donc pas suffisant afin de comparer différents cultivars pour des marchés précis. Entre 4.13 tms/ha et 4.5 tms/ha de chènevotte auraient aussi été produit dans le cadre de l'étude 2, ce qui démontre bien l'importance de développer des marchés pour cette composante du chanvre industriel.

5. CONCLUSION

Le but de ce projet était d‘évaluer l‘effet de trois pratiques culturales sur la productivité du chanvre industriel, soit la date d‘ensemencement, la densité de semis, et la date de récolte. L‘étude évaluait deux cultivars (Fédora 19 et Zolotonosha 11) sur un site de 4 hectares situé à Compton. Un autre cultivar (Finola-314) fut aussi évalué, pour la production de chènevis, sur un site de 4 hectares situé à Ayers Cliff. Les deux sites font partie de la région de l'Estrie au Québec.

Les trois dates de semis n'eurent aucun effet significatif sur le rendement en fibre observé 80 jours après le semis, et ce pour les deux variétés étudiées. Le rendement moyen en fibre dans le cadre de cette expérience fut de 7.83 tms/ha pour le Fédora 19 et 6.10 tms/ha pour le Zolotonosha 11. Seul le semis du 2 juin par contre résulta en chènevis à maturité. Le rendement en chènevis du Fédora 19 fut de 0.97 tms/ha et celui du Zolotonosha 11 de 0.49 tms/ha. Les trois taux de semis utilisés n'eurent aucun effet significatif sur le rendement en fibre observé 80 jours après le semis, et ce pour les deux variétés. Le rendement moyen en fibre observé lors de cette expérience fut de 7.03 tms/ha pour le Fédora 19 et de 6.35 tms/ha pour le Zolotonosha 11. La variabilité du site de Compton en termes de conditions de croissance peut cependant avoir masquer la présence de certains phénomènes lors de l'analyse statistique.

Tel qu'anticipé, la variété FIN-314 ensemencée au site d'Ayers Cliff s'est avérée une bonne productrice de chènevis, et ce malgré le semis tardif en 1998. Le rendement en chènevis observé fut de 1.27 tms/ha, ce qui fut subtantiellement plus élevé que ceux observés avec les deux autres variétés au site de Compton. Ce cultivar mérite donc d'être évalué plus en détails au cours des années à venir.

Compte tenu de l'expérience acquise et des résultats obtenus en 1998, les priorités de recherche au cours des années à venir devraient inclures: l'évaluation de la qualité de la fibre produite parallèlement à la quantité produite; l'effet de différents taux de semis et de fertilisation sur la quantité et qualité de fibre produite; le suivi des maladies fongiques affectant la culture chanvrière et leurs effets sur le taux de mortalité et la qualité de la fibre; l'identification et le développement de cultivars tirant profit des conditions de croissance québécoises; et le développement de sources de semence locales afin d'améliorer la rentabilité de cette culture. L'utilisation de sites de recherche présentant des conditions des croissance uniformes s'avérera de plus primordiale compte tenu que la croissance du chanvre semble être très sensible à ces variations.

Remerciements

Les auteurs aimeraient remercier les organismes suivant pour leur collaboration dans la réalisation de cette étude :

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ANNEXE 1

PLAN DES PARCELLES

SITE DE COMPTON, Qc

1998